jeudi 3 juillet 2008

Pourquoi on est allées à la Marche non-mixte du 14 juin, et pourquoi on en est reparties…


Texte écrit par Line-C, une traîne-la-patte.

La marche non-mixte du 14 juin s’annonçait bien : sur le papier du tract d’appel, rien à dire, au contraire, une bouffée d’air dans l’agenda politique du mouvement féministe. Rien à dire sur le fond, le ton, le point de vue ( NOUS) adoptés, le choix de la non –mixité, l’affirmation de notre force collective, pas d’organisation identifiable derrière. Alors on a eu envie d’y aller. On c’est moi et des copines des Rageuses. On y est allées à plusieurs, pour partager ce moment politique qui s’annonçait comme bienfaiteur au sens de thérapeutique pour les unes et les autres : reprendre l’espace sans peur, en force, comme le scandait le slogan le plus réussi de la manif : « LA RUE, L’ESPACE, LA PLACE…POUR NOUS ! », ce qui est énorme vu le parcours du combattant que ça peut représenter de se déplacer au quotidien pour nous toutes.

On y est donc allées. On retrouve avec plaisir des filles venues au Kabar du 11 juin. On constate avec plaisir aussi que nous sommes assez nombreuses, assez motivées à ce rassemblement. Commence la Marche.
Et là, on se met à ressentir du malaise, de la désapprobation, du décalage.
Au niveau des slogans et de l’itinéraire choisi principalement. Et puis on découvre un panneau avec inscrit : « être enfermée ou être voilée, tu parles d’un choix », et rien que là sur ce panneau, ça y est, y a beaucoup à redire !

Les slogans.
Ils sont trop souvent à la troisième personne : elle/elles (elle est harcelée, elle est agressée, elle est insultée, les femmes s’organisent…) et non à la première : NOUS. Et là, j’me suis dit : on n’est pas venues pour les autres, on est venues d’abord et avant tout pour nous-mêmes, on est venues pour crier en notre nom ! Ils sont trop souvent des injonctions (« saute, bouge, crie et frappe »), et des injonctions à faire des trucs balaises : frapper, exploser , détruire, défoncer des crânes.

Et là j’me suis dit : j’suis pas venue pour dire à d’autres femmes ce qu’elles doivent faire, et encore moins pour les faire complexer si elles se sentent pas d’avoir des réponses individuelles violentes aux violences reçues, moi-même j’en suis pas là du tout, et c’est comme ça.
Pareil, j’arrivais pas à reprendre le slogan : « dans tous les pays, dans tous les quartiers, liberté de circuler sans être emmerdées », (ou encore « solidarité entre les nations ») parce que là encore le point de vue est trop détaché : avant de parler de tous les pays (ou de toutes les nations), j’ai envie de parler du mien. Et mettre les quartiers sur le même plan que les pays c’est faire comme ci il y a des pays dans un pays, et ça ressemble à de la focalisation sur les quartiers populaires et indigènes, vu que c’est généralement ce que ça recouvre, « les quartiers ».

L’itinéraire, justement, il passe pour une grande partie à travers un quartier populaire et indigène de Paris, de quoi se demander là encore si cela ne suppose pas que le sexisme est plus spécifique à ces quartiers.

Bref, au final, on est déçues et on se retrouve pas là dedans, une fois de plus. On repart.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Salut,

pas grand chose à dire sur la plupart de tes arguments, que je comprends.
Juste une précision : concernant la nana qui arborait le slogan "être enfermée ou être voilée, tu parles d'un choix", elle ne reflétait pas du tout l'esprit de la manif' et beaucoup de filles se sont embrouillées méchamment avec elle. Complètement bornée et enfermée dans un féminisme raciste et excluant, elle a terminé la marche en nous suivant sur le trottoir plutôt que dans le cortège.
J'aurais personnellement été partisane de l'ecxlure purement et simplement de la manif', d'autant que les slogans avaient été travaillés et validés en amont de la marche et qu'il n'était pas question de tolérer ce genre d'amalgames.
Jo

Anonyme a dit…

C'est toujours pareil, on critique, on casse et rien de concret au bout.
Et si pour la prochaine, vous vous retroussiez vraiment les manches et proposiez des textes, des slogans, des chansons, un itinéraire ?

Je connais les organisatrices. Elles se sont défoncées pour faire bouger les choses, pour mobiliser les femmes.

Main dans la main, ce serait mieux, non ?

Pour la prochaine, J'aimerais que ce ne soient pas que des lesbiennes qui mènent le bateau mais des femmes de tous horizons ?

So ?

Anonyme a dit…

Puisque ce soir il y a un "vernissage" de l'expo sur cette marche + un débat (librairie Violette and Co.), serez-vous là ? Je suis d'accord avec votre commentaire, que j'avais lu cet été, mais aussi avec le commentaire ci-dessus : quand on est pas d'accord, on le dit aux organisatrices. Participer au débat de ce soir, ce serait bien, non ?